L’INNOCENCE
DE LA BONTE ET LA BETISE DE LA CRUAUTE
Catherine et moi sommes allés voir
« Bienvenue chez les Ch’tis », avec des sentiments mélangés. D’un
côté, la crainte de voir une farce de comique troupier, aux ficelles
grossières ; de l’autre, un picotement ethnologique de curiosité pour
comprendre comment cette comédie régionale pouvait attirer tant de nos
compatriotes.
Nous en sommes sortis tout joyeux
d’avoir vu un film populaire sans être vulgaire, débordant d’humour et de
bonté, deux sentiments peu fréquents par les temps qui courent. Les Français
sont des grands spécialistes de l’ironie, c’est-à-dire de l’art de se moquer
des autres. Ils sont moins réputés pour leur humour, qui consiste à se moquer
de soi-même. Le film n’est que taquinerie sur l’univers étrange de la Poste, là
où toutes les familles françaises rêvent de faire entrer leur enfant, et où
Besancenot cultive ses talents de révolutionnaire propret. Les pratiques de
promotion y sont pour le moins étranges (ce doit être pire à l’Éducation
nationale) et le bureau de poste de la bourgade nordiste est un joyeux foutoir
où l’on ne ménage pas son temps pour faire plaisir à ceux qui ne sont pas
encore des clients, ni même des usagers, mais des êtres humains tout
simplement. Les travers des Nordistes et des Méridionaux sont montrés sans
aucune méchanceté et cette belle diversité qui caractérise notre cher pays
(merci Braudel) se mue en une sorte d’unité chaleureuse. On rit de bon cœur
sans blesser personne.
Ce film ruisselle de bonté, comme un
cornet de frites de mayonnaise. Le temps est suspendu. Le facteur fait sa
tournée en s’arrêtant longuement chez chacun des destinataires, des gens d’âge
mûr présents à la maison en milieu de matinée. Il reste, certes, les cicatrices
de la fermeture des mines, mais l’on ne voit aucun chômeur ni même aucun jeune,
en dehors de l’escouade des postiers, qui a déjà la trentaine bien sonnée et
vit dans l’euphorie d’une parfaite sécurité « statutaire ». Les
rapports hiérarchiques sont arrondis par de nombreux festins pris en commun. Si
l’on était à Strasbourg, on parlerait de « La petite France », un
paradis local où les soucis du monde ne viennent pas troubler l’innocence d’une douce communauté
de fonctionnaires, de commerçants et de retraités.
Comme il est difficile de gouverner
un peuple qui rêve d’une France mythique de l’après-guerre et qui considère que
ce qui se passe à Paris est à des années-lumière de Bergues ou de Porquerolles !
Or le monde est méchant, et bête qui plus est. Prenons deux exemples, l’un
planétaire, l’autre parlementaire.
Pékin s’est trompé à propos des Jeux
Olympiques. >>> lire la suite >>>
Les commentaires récents